
Tortue et serpent étaient de très grands amis. Ils se rencontraient fréquemment, passaient de longues heures à converser ensemble. Souvent, Tortue invitait son compère à partager son repas, quand ce n’était pas serpent qui invitait sa commère. Bref, tout le monde les appelait les inséparables. Pourtant un jour, ils se sont fâchés et jamais plus on ne les a vus ensemble. Leurs voisins étaient très intrigués par cette brouille et auraient bien voulu savoir ce qui s’était passé. Ils les ont questionnés l’un et l’autre voici ce qu’ils ont fini par apprendre.
Tortue avait prié son ami de venir manger chez elle serpent s’est mis en route, ayant appétit. Quand il arrive au domicile de son amie, une odeur délicieuse l’accueille, mais il n’y a personne pour le recevoir à l’entrée de la maison. Il appelle; pas de réponse! alors, il pousse la porte et entre. Au milieu de la pièce, se trouve une grosse calebasse d’où s’élève un fumet de bonne nourriture. Mais le récipient est recouvert d’un énorme couvercle. C’est tortue qui s’est étendue là pour jouer un vilain tour à son compère. Hé, compère, que fais-tu donc là ? S’écrie serpent, fort surpris de cette attitude. Ne vois-tu pas qu’avec ta grosse carapace, tu couvres tout le plat et que je ne puis me servir ? Est-ce une chose à faire ? ôte-toi de là car j’ai grand appétit.

Tortue ne bouge ni ne répond, si ce n’est par un ricanement moqueur. Serpent attend quelques instants espérant qu’elle voudra bien libérer la calebasse. Puis voyant qu’elle se moque de lui, il s’en va, pas content du tout.
Quelques jours passent. Enfin, un beau matin, serpent envoie un de ses fils inviter son amie tortue à venir partager son repas. Celle-ci fait arrivée, elle découvre serpent soigneusement enroulé sur lui-même et formant un gros couvercle qui bouche entièrement le plat de nourriture avec les anneaux de son corps.
Hé compère, que fais-tu là ? S’écrie-t-elle. En voilà un couvercle pour Une calebasse ! Pousse-toi donc afin que je me serve à manger.
Serpent se garde de bouger. Mais il lui répond d’une voix sifflante de colère :
Chère sœur, as-tu donc oublié le vilain tour que tu m’as joué la dernière fois que j’ai été ton invité ? Si c’est ainsi que tu reçois tes amis, pourquoi veux-tu que je n’aie pas la même attitude ? Mon devoir est de te rendre la pareille. Pour honorer ta générosité, je te rends ainsi le bon repas que tu m’as offert ! Peut-on garder des amis si on se moque d’eux ? Si vous agissez mal envers quelqu’un, pourquoi voudriez-vous que, lui, agisse bien envers vous ?
Conte tiré de “Contes des Lagunes et Savanes,” Collection ‘Fleuve et Flamme,’ édition Edicef, 1975