
En période de sécheresse, la terre aride ne produit presque rien, la famine s’étend dans le pays tant pour les hommes que pour les animaux. Cette année, les récoltes avaient été mauvaises et les greniers étaient vides.
Compère d’Azui, le lièvre aux mille ruses, malgré toute sa malice, souffrait de la faim comme les autres. Du matin au soir, il errait à travers la brousse, ramassant des graines de fruits sauvages, des racines: tout ce qui pouvait être mangé. Or, dans la savane, il aperçoit soudain un baobab.

Il s’en approche, espérant trouver du pain de singe mais il n’y en avait pas. Par contre, lorsqu’il s’approche de l’arbre, des abeilles sortent d’un trou dans le tronc en bourdonnant.
S’il y a des abeilles, il y a du miel se dit compère Azui.
Laissons-les travailler à cette heure! Ne les dérangeons pas! Nous reviendrons ce soir, quand elles seront fatiguées et prêtes à s’endormir. Il sera facile de partager leur repas. Et silence, lièvre s’en retourne chez lui.
Or il y avait dans la savane un génie qui raffolait de miel. Il vient à passer au pied du baobab, aperçoit les abeilles et se tient le même raisonnement qu’Azui.

Le lièvre a tellement faim qu’il se presse de revenir. Il arrive exactement au moment où les abeilles viennent de s’endormir. Il enfonce bras dans le trou du baobab, délicatement, et en retire tous les rayons de miel qu’il peut saisir. Il y en avait encore un peu au fond de la ruche mais le bras de compère lièvre était trop court et il ne pouvait l’attraper. Chargé des rayons de miel, Azui s’éloigne du baobab et s’en revient à sa maison. A peine s’est-il éloigné que le génie amateur de miel arrive. Il plonge le bras dans le trou de l’arbre ou nichaient les abeilles mais ne peut atteindre les rayons de miel qui restaient. Pendant qu’il fait des efforts pour y parvenir, il entend quelqu’un arriver. Pour ne pas être surpris, il entre dans la ruche et s’y blottit. Azui, car c’était lui qui revenait, ne voit donc rien. Il s’approche et enfonce le bras dans le trou. Aussitôt le génie comprend que le voleur de miel est de retour et saisit vigoureusement la main de celui-ci compère lièvre, se voyant pris au piège, se débat de toutes ses forces pour se libérèrent criant:
Qui tient mon bras? Lâchez-moi!
Le génie, le tenant toujours, répond:
C’est moi!
– Qui moi?
– Moi le génie-lanceur de la savane qui va te dévorer.

– Ce n’est pas vrai! dit compère livre le rusé. Il n’y a pas de génie-lanceur. Si cela existait, puisqu’il m’a attrapé, il m’aurait déjà projeté très loin de la ruche! Or je suis toujours là mens! tu n’es qu’un petit voleur de miel!
– Ah? je ne suis pas le génie-lanceur de la savane? Ah! Je mens? C’est ce que nous allons voir! rétorque le génie, très vexé, et de toutes ses forces, il lance Azui le plus loin qu’il peut.
Compère lièvre tombe à bonne distance dans de hauts herbes qui amortissent le choc. Il se relève immédiatement et se met à crier:

Tu es vraiment le génie-lanceur de la savane, mais tu es trop bête! Quand tu me tenais solidement par le bras, j’étais ton prisonnier et tu pouvais me dévorer. Essaie donc de le faire maintenant que tu m’as projeté loin de toi et que je suis libre. A peine a-t-il achevé ces mots qu’il se sauve à toute vitesse vers son terrier. Et le génie, furieux et déçu, le voyant filer comme l’éclair comprend un peu tard qu’il a été berné.
C’est parce qu’il sait toujours se sortir d’affaire grâce à ses astuces que tout le monde, ici, dit que compère lièvre est le plus rusé de tous les animaux.
Conte tiré de “Contes des Lagunes et Savanes,” Collection ‘Fleuve et Flamme,’ édition Edicef, 1975.